Le couvre-feu, entre 23h et 6h du matin a été décrété le 23 mars 2020 au Sénégal. Le port du masque est obligatoire à l'extérieur | © Keystone
Dossier

Covid-19: les pays du Sud face à la pandémie: le Sénégal (9)

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Le Sénégal touché par la pandémie de coronavirus est en éta d’urgence depuis le 23 mars 2020. La pénurie de réserves alimentaire et le manque de pluie font craindre la famine. Les groupes de solidarité et d’épargne (les calebasses) connaissent cependant un grand succès et de nombreux villages profitent de leurs compétences pour faire face à la crise du coronavirus.

Le premier cas de Covid-19 a été enregistré le 2 mars dernier. Dès lors, la courbe n’a cessé d’augmenter. Le pays fait état, le 11 mai, de 1’709 personnes infectées, 18 morts et 650 guérisons. Le coronavirus a principalement touché la population urbaine alors que celle des villages a été épargnée jusqu’à présent. Ces dernières semaines, la pandémie gagne du terrain dans le pays, avec notamment l’apparition de plusieurs cas communautaires.

Depuis le 23 mars, le pays est en état d’urgence. Toutes les frontières sont closes et un couvre-feu a été instauré entre 20 heures et 6 heures du matin. Les marchés sont fermés et, dès 16 heures, les autres magasins doivent l’être également. Le port du masque est obligatoire à l’extérieur de la maison. L’impact du coronavirus touche plusieurs secteurs comme le tourisme, les transports ou la pêche.

Production «maison» de désinfectant

L’interdiction de voyager à l’intérieur du pays met en difficulté de nombreuses personnes, telles les femmes membres de la calebasse de Thialane. En effet, ces dernières vivent au milieu du delta du fleuve Saloum et leur seul moyen de transport est la pirogue. Elles attendent donc impatiemment la levée de l’interdiction, car les ingrédients pour fabriquer de l’eau de Javel commencent à manquer. Jusqu’à présent, elles ont pu produire 186 litres de désinfectant et de produit de nettoyage qui bénéficient aux 800 habitants de leur village.

Les calebasses ont contribué à la lutte conter le virus en favorisant, notamment, la fabrication de savon et d’eau de javel | © Action de Carême

Les femmes membres de la calebasse de Soukouta ont produit elles-mêmes 700 litres d’eau de Javel et 150 pots de savon ces dernières semaines. Avec l’apparition du coronavirus, le besoin en savon pour le lavage des mains et en eau de Javel pour la désinfection régulière des sols, des étagères et des installations sanitaires s’est accru. Les femmes ont produit en grande quantité, de sorte que ni les membres du groupe ni la population du village ne souffrent de pénurie.

Ces dernières années, les groupes d’épargne et de solidarité sont devenus une institution importante dans tout le pays et ont permis d’améliorer la qualité de vie d’un grand nombre de communautés. Pour la plupart des membres, le renforcement de la cohésion sociale et de la solidarité constitue la plus grande réussite des calebasses. L’épargne communautaire n’est que secondaire.

Crainte d’une famine

En raison des nombreuses restrictions en vigueur pour éviter la propagation du virus, la vie est devenue très difficile pour la population. Les prix des denrées alimentaires augmentent et les réserves, déjà faibles, sont presque épuisées. En 2019, les précipitations ont été peu abondantes et, par conséquent, la récolte a été mauvaise.

Il est à craindre que le Sénégal ne soit confronté à une famine. Le gouvernement a distribué des aides alimentaires à un million de foyers à travers le pays, qui compte 16 millions d’habitants, mais en raison de l’interdiction de voyager dans le pays, la manière dont ces colis parviendront aux personnes dans le besoin reste incertaine. L’interdiction de quitter le pays et de se rassembler signifie que même la tradition de déposer de la nourriture destinée aux plus démunis dans les mosquées pendant le Ramadan ne pourra être maintenue cette année.

Les organisations partenaires d’Action de Carême sont également soumises à des restrictions, étant donné qu’il est actuellement impossible de se rendre dans les villages. Cependant, elles soutiennent leurs bénéficiaires du mieux qu’elles le peuvent en ayant recours au téléphone. Elles diffusent des informations ainsi que des règles de conduite et conseillent les groupes, voire servent de médiatrices en cas de difficultés. Elles collaborent également avec les autorités locales et soutiennent les mesures d’hygiène, notamment par la distribution de savons artisanaux.

Action de Carême prévoit de continuer à soutenir ses organisations partenaires dans ses 14 pays d’intervention afin qu’elles ne soient pas contraintes de licencier du personnel et qu’elles puissent adapter leur travail aux circonstances. (cath.ch/com/ag/bh)

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